Carole Delga est la Présidente du Conseil Régional d’Occitanie. Elle fut Secrétaire d’État sous François Hollande et a refusé le poste de Première Ministre que lui proposait le Président Macron. C’est l’une des oratrices les plus performantes de notre monde politique. La montrer en exemple, c’est exprimer le souhait que les politiques et tous les orateurs de notre vie publique aient sa tenue dans les débats. Une autre oratrice remarquable, Christiane Taubira, après son discours sur le mariage pour tous à l’Assemblée Nationale, a reçu des félicitations de députés gaullistes qui pourtant s’y sont opposés. Bien parler en public, c’est faire honneur même à ses adversaires.
Mis à part les passages de certains de ses discours à la tribune, où son regard se perd un peu longuement dans ses notes, Carole Delga a toujours pour ses auditeurs un regard accueillant. Cela se voit d’autant plus dans ses débats ou ses interviews où les interlocuteurs sont peu nombreux. Quand elle leur parle, ses yeux brillent d’un intérêt sans réserve pour eux. Tout en leur adressant ses répliques, elle ne cesse pas de les considérer dans son regard. Ils sont sa boussole qui oriente son discours.
La première conséquence de ce regard de qualité sur ses auditeurs est que cette oratrice ne se répète pas et n’entre jamais dans des tunnels où le discours ennuie. Quel qu’il soit, son auditeur est son aiguillon pour faire avancer sa pensée. Un élément nouveau s’ajoute toujours au précédent. Elle conserve ainsi notre attention jusqu’à la fin de ses démonstrations, où sa pensée se ramasse toujours en une conclusion pertinente. Elle n’a aucune réticence à accepter de débat, bien au contraire puisque sa pensée s’en nourrit. Sur un plateau de télévision elle répond toujours aux questions et aux objections avec une certaine gaité.
La deuxième conséquence positive du regard de Carole Delga sur ses interlocuteurs est une tendance à verticaliser souvent sa posture. Quand on vise passionnément du regard la cible au tir à l’arc, on redresse d’instinct son dos sans que l’instructeur ait à le demander. Carole Delga le fait aussi souvent, tant elle regarde son interlocuteur avec l’envie de toucher juste dans son esprit. Et chacun sait que le dos redressé favorise le passage de la colonne d’air, par conséquent le bon placement de la voix. Celle de Carole Delga est nette et claire. Elle lui permet de revendiquer agréablement son style (son accent par exemple) et sa conviction.
Enfin l’ouverture de cette oratrice à la présence de ses interlocuteurs lui fait accueillir avec intérêt leurs coupures de parole. Elle ne se bat pas pour la garder. Elle s’interrompt pour écouter, et quand elle parle à nouveau sa pensée s’enrichit d’une réponse à l’interruption sans pour autant perdre son cap. Car sa tenue plutôt droite lui conserve toujours une certaine sérénité, par conséquent la présence à l’esprit de son objectif.
Il est probable que cette oratrice n’a pas appris la peur de l’autre, quand enfant, elle s’exprimait face aux adultes. Grâce en soit rendue à sa nature, et sans doute aussi à ses éducateurs.
Stéphane André