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Jean-Laurent Cochet dans la lignée de Louis Jouvet

Jean-Laurent Cochet dans la lignée de Louis Jouvet

Louis Jouvet est, avec Cicéron, un maître à penser de notre Ecole. Ses ouvrages sur le théâtre et ses cours au Conservatoire National d’Art Dramatique, pris en sténo entre novembre 1939 et décembre 1940, ont guidé notre compréhension des lois du théâtre où sévissent les orateurs, celui de la vie publique. Louis Jouvet est mort en 1951.

Jean Meyer, comédien et metteur en scène, était entré dans sa classe au Conservatoire National d’Art Dramatique en 1934. Il fut ensuite vingt-deux ans pensionnaire à la Comédie Française. Il fut ensuite directeur de plusieurs théâtres, dont celui du Palais Royal à Paris où il joua et mit en scène Molière et les grands auteurs classiques en y apportant tout l’esprit de Louis Jouvet. Jean Meyer est mort en 2003. Il fut l’un des maîtres de Jean-Laurent Cochet, comédien, metteur en scène et lui aussi professeur d’Art Dramatique. Son cours est célèbre pour avoir formé entre autres Isabelle Huppert, Gérard Depardieu, Daniel Auteuil et Fabrice Luchini. Le coronavirus l’a tué le 7 avril dernier. Voici ce que Fabrice Luchini dit de lui dans son livre « Comédie Française » :

« Quand je suis entré pour la première fois dans le cours de théâtre de Jean Laurent Cochet, [j’ai eu] la sensation qu’un immense travail m’attendait et que mon ego, mon intelligence, mon intuition, mes dons, ces vertus que l’on pourrait appeler bêtement « la personnalité », ne seraient pas la première chose à alerter. Il me faudrait plutôt essayer d’atteindre une science, le mot est prétentieux et excessif peut-être, mais disons un sens, une intuition de la partition classique. Ce moment immense, assez proche de la foi, et que le professeur Jean-Laurent Cochet, traversé lui aussi par la locomotive immortelle de Jouvet, m’a transmis. »

La locomotive de Louis Jouvet a traversé Jean Meyer, Jean Laurent Cochet, Fabrice Luchini et nous traverse à notre tour. Chez l’orateur, la personnalité n’est pas non plus « la première chose à alerter ». Il ne parle pas pour faire un numéro. Il lui faut aussi « atteindre un sens, une intuition » de ce qu’est son rôle public d’enseignant, de manager, d’avocat ou de politique. Le rôle public est la « partition classique » de l’orateur. Pour lui et pour le comédien, l’oubli de soi n’est pas un but, mais le résultat du travail du rôle. C’est aussi une élévation de l’esprit.

Merci aux héritiers de Louis Jouvet et tout spécialement aujourd’hui à Jean Laurent Cochet.

 

Stéphane André