Retourner sur le site

Violences à l’école : la solution de l’éloquence ?

La violence dans le monde des ados a atteint des sommets au mois d’avril. Nous ne pouvons faire l’impasse sur ce qui s’est écrit sur le sujet. Un article paru dans le journal L’Express du 11 avril a pour titre : « Violence des ados : l’école ne peut pas tout ». L’auteur en appelle à une multitude d’intervenants extérieurs, parents, collectivités locales, forces de l’ordre, plateformes numériques, institutions judiciaires, en plus des proviseurs, des psychologues et des inspecteurs que compte mobiliser le Premier Ministre Gabriel Attal. Il conclut ainsi : « La lutte contre le phénomène d’ultraviolence chez les adolescents nécessite une mobilisation de tous les acteurs et pas uniquement de l’institution scolaire ». Tous ces « acteurs » ne pourront hélas qu’endiguer cette violence. Mais ne l’éradiqueront pas. Il est remarquable que dans cette liste on ne nomme pas les professeurs.

Plus tard, dans le journal Le Parisien du 21 avril, l’accroche d’un article sur le même sujet fustige les réseaux dits sociaux : « Ragots, médisances ou photos intimes pullulent sur les réseaux. Des documents diffusés pour « afficher » ses camarades de classe. Ce fléau serait à l’origine de l’agression de Samara à Montpellier. » La classe, pourtant premier réseau social des ados, n’est citée qu’au passage. Bien sûr, le plus souvent ce sont les réseaux dits sociaux qui conduisent les victimes de harcèlement soit à leur suicide soit à leur assassinat. Et la presse ne voit malheureusement que ces drames terribles. Mais comme les politiques, elle n’en voit toujours pas la cause première : l’ennui en milieu scolaire qui touche 70 % des élèves (étude de l’Association de la fondation étudiante pour la ville).
 

Pour éradiquer la violence des ados, il faut l’empêcher de naître dans le cocon de la classe. Une solution pour cela serait de former les enseignants à remplir leur contrat d’orateur. Un élève interrogé au micro de France 2 mentionnait le manque d’éloquence de ses professeurs “Les profs, parfois ils endorment avec leur façon de parler”.

Il est dans la nature de tous les publics de se couler toujours d’abord dans le rôle qu’on leur propose. Des enfants qui entrent dans une salle de classe en début d’année scolaire, voyant l’estrade, le bureau sur l’estrade, l’adulte qui l’occupe et le tableau noir, sont canalisés comme un liquide vers la place que leur réserve le dispositif scénique. Ils s’asseyent spontanément, ils se préparent à suivre ce qui va se passer sur l’estrade. Tous les publics, même celui des ados, sont ainsi naturellement disposés à l’écoute. Il revient aux orateurs qui s’adressent à eux de ne pas les décevoir. S’ils ne trouvent pas les mots et le ton justes pour s’en faire entendre et par là les intéresser, ils les déçoivent. Alors, désœuvrés, les publics s’ennuient. C’est souvent le cas en milieu scolaire. Et la violence naît de l’ennui.

Victime d’une vision purement mécanique de la transmission du savoir, notre Éducation Nationale ne s’est jamais beaucoup intéressée à la relation entre le professeur et sa classe. Les réseaux dits sociaux risquent aujourd’hui de le lui faire regretter.

 

Stéphane André